mercredi 8 novembre 2017

1 - Je t'ai vu sous le figuier, ou : devenir oblat bénédictin

7 septembre 2011

Je roule au volant de ma puissante Peugeot 308 break sur l'autoroute entre Toulouse et Ganagobie.

Ganago-quoi ?

Ganagobie. C'est un petit village d'une centaine d'âmes, situé à l'ouest de Digne et à l'est de Forcalquier, dans les Alpes de Haute-Provence (04).

Que fais-je sur la route de Ganagobie ?

Je vous conte l'histoire. Elle remonte au mois d'août précédent.

J'étais allé suivre avec mon épouse une session de formation à Solesmes auprès de l'AFCP, l'association pour la formation chrétienne de la personne, animée par Madame Aline Lizotte.

C'était la seconde fois que je me rendais à l'abbaye de Solesmes, mais je n'ai pas de souvenir de ma première visite, aussi curieux que cela puisse paraître.

Nous avons assisté un jour à la messe conventuelle chez les moines, installés ici en 1833 par dom Prosper Guéranger, restaurateur de l'Ordre bénédictin en France et grand promoteur de la liturgie grégorienne. Le lendemain nous avons été accueillis par les moniales de l'abbaye sainte Cécile toute proche.

Pendant le voyage du retour, j'ai "senti" quelque chose. Une attirance, un barrunto, que sais-je ?

Je connais quelqu'un qui est oblat bénédictin de l'abbaye de Fontgombault. Alors, je me suis posé des questions. Quid de l'oblature ?

Je m'en suis ouvert à mon archevêque, Monseigneur Robert Le Gall, lui-même bénédictin et ancien abbé de l'abbaye sainte Anne de Kergonan. Il m'a dit : "Solesmes, c'est beau, certes, mais c'est loin. Pourquoi n'allez-vous pas faire un tour à l'abbaye d'En Calcat ?"

Moi, en matière de spiritualité, l'obéissance c'est mon truc. Je suis donc allé à En Calcat, proche de Toulouse. J'y ai rencontré longuement le Père des oblats, qui m'a expliqué tout un tas de choses que vous trouverez résumées ici (les forums, c'est mon autre truc).

Ce que j'ai retenu de l'oblature, c'est que c'est une vocation qui commence par une attirance envers un monastère ou une abbaye. Une attirance sensible. Cela m'a été confirmé par trois moines, un Père Abbé et deux Frères directeurs des oblats. Ensuite, doit se manifester une seconde attirance, envers la communauté du monastère ou de l'abbaye en question (un monastère c'est une petite abbaye, en deux mots). Pour ce qui est d'En Calcat, c'est vraiment une abbaye un peu moderne pour mes goûts plutôt classiques (j'aime le latin, les vieilles pierres, les chants grégoriens, l'encens et les objets du culte en métal, pas en terre cuite...) et la condition numéro un, sensible, n'a pas été remplie du tout. Quand on arrive à En Calcat en venant de Solesmes, on a un choc.

Je suis donc rentré chez moi et ai consulté sur Internet la carte des établissements bénédictins de la région sud. J'ai trouvé quelques sites ouaibes et regardé (attentivement) les photos et les kilomètres. Mon regard a été attiré par Notre Dame de Belloc, à Urt, près de Bayonne. J'ai pris rendez-vous et j'y suis allé. Après la messe (de type terre cuite), j'ai été convié à déjeuner, puis j'ai eu un entretien avec le Frère directeur des oblats, puis avec le Père Abbé. Le Père Abbé m'a soigneusement écouté, puis m'a déclaré tout de go, mi figue mi raisin : "Vous avez un appel, et vous devriez plutôt aller voir du côté de Ganagobie."

Alors j'ai pris la route du monastère de Ganagobie.



(toutes les photos de ce blog sont (c) 2011 "Desiderius" sauf explicitement mentionné)

Note novembre 2017 : Ce blog est la transposition d'une première publication qui avait été créée en 2011 sur le site OverBlog, du temps où les auteurs ne voyaient pas leurs textes envahis de spam publicitaires des plus douteux. Pour un blog à vocation apostolique, c'était mal vu. Je l'ai donc transféré ici. De plus, OverBlog a décidé tout seul de changer la pagination de ses blogs, donc mes billets - qui étaient soigneusement classés par ordre chronologique croissant (sur option) - sont maintenant classés par ordre chronologique décroissant, rendant la visite incompréhensible et trahissant l'esprit de l'auteur, et en plus ils ont supprimé l'option permettant de changer cet ordre de classement. Du grand n'importe quoi, quoi. D'où son déménagement.

Pour naviguer dans ce blog, utiliser le lien "article plus ancien" tout en bas de la page afin de passer au billet suivant par ordre chronologique.

2 - "Salut vieille branche", dit le figuier

7 septembre, 17h.

Après cinq heures d'autoroute et quatre kilomètres de lacets, j'arrive au monastère de Ganagobie.
Deuxième choc.
C'est beau !
C'est même très beau.

J'insiste et prouve :

crédit photo (c) monastère ND de Ganagobie

Je gare mon véhicule sur le parking des "retraitants" et m'achemine vers l'accueil.

C'est là que mon ami le figuier se manifeste pour la première fois, en témoignant une grande affection pour mon oeil gauche en guise de bienvenue (heureusement que je porte des lunettes).


Je sonne à la porte


au dessus de laquelle le visiteur est doucement accueilli par Notre Dame et l'Enfant Jésus :


En attendant que l'on vienne m'ouvrir, j'en profite pour faire une photo de l'église abbatiale, qui a meilleure mine aujourd'hui


qu'en 1880...


On m'ouvre. Le frère hôtelier est le Frère François, "prêté" par l'abbaye de Fontgombault. Il me fait visiter l'oratoire des retraitants.


La salle de séjour de l'hôtellerie sert aussi de réfectoire pour les dames (qui ne prennent pas leurs repas avec les moines, comme le font les messieurs).


Ma chambre.


La fenêtre de ma chambre, orientée plein Est, donne sur le cloître des retraitants en groupe (le monastère peut accueillir et loger des groupes jusqu'à trente personnes) et les pieds de tomates.


17h25 sonne. Bientôt les Vêpres.

3 - Les Noces de Gana(gobie)

7 septembre, 17h30

Le sonneur est sorti pour sonner les Vêpres.


En fait, comme vous avez pu le constater, il est plutôt entré puisque la corde de la cloche est située dans l'église, la cloche étant installée dans un petit clocher qui, pour des raisons inconnues, n'a pas été construit au sommet du nouveau clocher reconstruit avec le choeur en 1960 (merci André Malraux et Francis Bouygues) suite aux démolitions effectuées sous la Révolution (cliquer sur les photos ci-dessous pour les agrandir.)


 crédit photo (c) monastère ND de Ganagobie

Donc, on disait, les Vêpres.
Cela se passe dans l'église (évidemment).
Elle est belle et porte à la prière.
Si.


A droite, une statue de la Vierge Marie


et on chante, et on prie.


Mais à 19h c'est l'heure de la soupe. Nous sommes invités aux noces, allons-y !

Comme je viens d'arriver, la coutume bénédictine fait que le Père Abbé en personne me lave les mains. Emouvant.


Le réfectoire des moines.


En fait, nous sommes ensemble avec les moines pour le déjeuner et le dîner, mais j'ai évité de faire une photo quand ils sont là...

Menu : Salade de tomates (du jardin), macédoine de légumes (du jardin), un (gros) morceau de fromage (excellent), un vin rouge (très bon, un Corbières ou un Ventoux, probablement) qui doit faire au moins 14° et des figues (du jardin) au four.

Merci mon ami le figuier.

4 - Un retraitant accompli à Complies

7 septembre, 20h15

Nous verrons demain que, l'office de Prime étant à 5h, on se couche plutôt tôt, par ici. Donc les Complies sont à 20h et les moines se couchent à 21 h.

(le photographe a attendu que les moines se soient retirés pour prendre la photo)

20h30, la nuit tombe (silencieusement, comme tout ici).


La Durance fait tout ce qu'elle peut pour couler (silencieusement) du Nord


au sud.


C'est drôle, après deux offices et un dîner, on se sent déjà chez soi. En fait, on est devenu un retraitant accompli.

Bonne nuit !

5 - Il est cinq heures, Ganagobie s'éveille...

8 septembre, fête de la Nativité de la Vierge Marie, 5h
Dur dur.
Vue à l'ouverture des volets :


L'hôtellerie vue du parking des retraitants (oui, je vais aux Vigiles avec mon appareil photo, pourquoi ?) :-)


A 5h du matin, avant l'arrivée de la communauté, il n' y a pas foule dans l'église, mais quelqu'un est déjà passé allumer les cierges et les lumignons votifs de Notre Dame en ce beau jour de son anniversaire.


6h, les Vigiles sont finies, direction la chambre pour un brin de toilette, faire son lit, ranger tout, la routine de la vie "dans le monde". Le soleil s'est levé (photo prise depuis le jardin des moines, montrant la facade Est de l'hôtellerie).


6h30. Une demi-heure de méditation silencieuse devant le Très Saint Sacrement, avant les Laudes à 7h.



"Non, Jeff, t'es pas tout seul", me dit mon ami le figuier.

A suivre...

6 - Après l'aube, les Laudes

8 septembre, 7h.

J'ai fait mon lit.


Les Laudes sont le temps de prière le plus important avec les Vêpres.
On le remarque rapidement car l'église s'est remplie de ses retraitants.
A 9h, elle se remplira encore de visiteurs et d'habitués pour assister à la sainte Messe.

(pourquoi ils sont tous à gauche, aucune idée...)

7h30, plus personne, c'est (enfin) l'heure du...


... petit déjeuner ! Au menu, café noir fa-bu-leux, pain, beurre, confiture de mirabelles (fantastique) et de figues (encore ?), le tout agrémenté d'un reste de figues au four d'hier soir.


Il fait grand beau en sortant du réfectoire.


Visite au cimetière des moines. Ils sont douze (en 2011, date de la rédaction de ce blog). Puis, en 2013, le Père René Gaillard nous a quittés, à 93 ans, après 64 ans de sacerdoce. En 2018 ce fut Dom Michel Pascal, abbé émérite, instigateur du déménagement de Hautecombe à Ganagobie, et Dom René-Hugues de Lacheisserie, abbé émérite, successeur de Dom Michel, le 1er janvier 2021).


Le premier :


Le dernier (EDIT 2021 : Le dernier est maintenant Dom René-Hugues - manque la photo) :


Prochain message, la messe à 9h.

7 - Tierce, messe, un passe et ne manque pas

8 septembre, 9h

Aujourd'hui, rappelons-le, c'est la fête de la Nativité de la Vierge Marie, autrement dit son anniversaire.
Les visiteurs sont nombreux pour assister à l'office puis à la messe.
Même l'église est en fête, mais à la façon bénédictine. Pas de superflu ! Juste quelques bougies en plus au fond ! :-)


D'abord, l'office


puis la messe, officiée par le Père-Abbé René-Hugues de Lacheisserie.

crédit photo (c) monastère de Ganagobie

Notre Dame a été gâtée de lumignons.


Après la messe, saut à la boutique pour acheter le "best seller" du moment : A quoi servent les moines, dialogue entre dom Michel Pascal, précédent Père-Abbé de ND de Ganagobie (celui qui amena tout le monde de Hautecombe), et un journaliste.


En vente à la boutique.

Le même avec votre serviteur, après la séance incontournable de dédicaces


Ensuite, quelques autres photos










On se retrouve à midi pour Sexte. Ok ?